12.01.2024

"Il y a une voie possible, dans laquelle de nombreux citoyens peuvent se retrouver !" Nathalie COLIN-OESTERLÉ

Entretien avec Nathalie COLIN-OESTERLÉ, Députée européenne, accordé à l'équipe du siège Les Centristes afin d'évoquer la directive européenne sur les violences faites aux femmes et les élections européennes à venir : 

Quelle est la situation actuelle en France concernant les violences domestiques et les violences sexuelles ?
Malgré les promesses d’Emmanuel Macron sur l’égalité et la protection des femmes, il y a une augmentation nette des cas de violence domestique. Ces chiffres en hausse me hantent. Nous sommes pourtant nombreux à nous battre quotidiennement pour éradiquer ce fléau. Le Gouvernement et Isabelle Rome (ancienne ministre) avaient amorcé un réel travail avec la mise en place du Pack nouveau départ, avec les pôles spécialisés dans les tribunaux, avec des avancées en matière d’ordonnances de protection, mais cela n’est pas assez… Il est nécessaire, surtout, d’avoir une réponse pénale adaptée !

Aujourd’hui, la loi pénale française protège non pas les victimes mais les auteurs, car ces derniers savent qu’ils ont peu de chance d’être condamnés. Le cas du viol est malheureusement un très bon exemple. C’est cette quasi impunité qui explique qu’il y a eu une hausse de 15% entre 2021 et 2022 et de 7% entre 2022 et 2023 du nombre de violences commises sur les femmes par leur partenaire ou ancien partenaire. En 2023, 240 faits de violences sexuelles sont décomptés chaque jour. Comment ne pas s’offusquer de ces chiffres en augmentation ? Pourquoi le Gouvernement ne se mobilise pas quotidiennement pour lutter contre ce fléau ?
 
Comment se comportent nos voisins ? Quels sont les développements récents en Europe concernant les lois sur le féminicide et la définition du viol, et comment diffèrent-ils de la France ?
En Europe,  tous les Etats membres ont conscience de la nécessité de lutter contre les violences faites aux femmes et de prévenir les féminicides. Certains Etats passent cependant de la parole aux actes en s’armant d’un véritable arsenal législatif. C’est le cas de la Belgique avec l’adoption de la loi Stop Fémicide, qui en fait le premier pays européen doté d’une législation complète contre le féminicide. Nous souhaitons faire la même chose au niveau européen avec une directive visant à lutter contre les violences faites aux femmes.

Dans ce texte cependant, la France, comme l’Allemagne ou la Hongrie, ne veulent pas d’une définition européenne du viol basée sur l’absence de consentement. C’est assez étonnant de voir que l’Italie de Giorgia Meloni, que l’on qualifie de conservatrice (en opposition à la France d’Emmanuel Macron qui se targue d’être progressiste), s’est positionnée publiquement pour une définition européenne. C’est pourquoi avec François-Xavier Bellamy nous avons cosigné une tribune dénonçant la position française. 
En France, la définition actuelle demande à prouver que (1) la victime s’est opposée à la pénétration et (2) que le mis en cause est allé au-delà de l’opposition de la victime en ayant recours à la menace, contrainte, violence ou surprise. Un non ne suffit pas. Il est aujourd’hui très difficile pour un juge de qualifier juridiquement un viol en raison de cette définition ultra restrictive. Car s’il est moins difficile de prouver la menace ou la violence, ce n’est pas le cas pour la contrainte (morale notamment) ou la surprise qui concernent la majorité des viols, 90% étant commis dans la sphère proche.
Avec la définition basée sur l’absence de consentement, il sera possible de prouver par tout moyen l’absence de consentement. Pas question de faire peser la charge de la preuve uniquement sur le mis en cause mais on élargit le champ de la preuve. La victime pourra prouver qu’elle n’était pas consentante et l’auteur qu’il a pris les mesures nécessaires pour s’assurer du consentement de la victime, notamment dans des cas où cette dernière est dans une situation de vulnérabilité ou dans un état de sidération (en raison de son âge, lien hiérarchique avec l’auteur, alcool, handicap, etc.)
On taxe souvent la droite européenne d’être conservatrice. Mais les moins progressistes ici sur la question du viol ce sont les gouvernements du groupe d’Emmanuel Macron (France, Estonie, Pays-Bas, sauf Belgique) et des socialistes (Allemagne notamment) qui sont contre. Aucun gouvernement PPE ne s’est, quant à lui, positionné contre. 
 
Quelle est votre vision et quels sont les principaux thèmes de campagne pour les prochaines élections européennes ?
Pour les élections européennes, entre l’extrême droite et le groupe Macroniste, il y a une voie possible, dans laquelle de nombreux citoyens peuvent se retrouver. Nous voulons un projet européen qui n’est ni fédéraliste, ni nationaliste ! Une Europe utile, un projet pragmatique et réaliste qui rend l’action publique plus efficace. C’est le sens du travail mené depuis 2019 pour la souveraineté de l’Europe en matière énergétique avec la défense du nucléaire, pour défendre notre agriculture et notre souveraineté alimentaire ou protéger le tissu économique et industriel de la concurrence étrangère. Les sujets que je porte quotidiennement seront au cœur du débat : la santé avec la lutte contre les pénuries de médicaments, la question de notre souveraineté sanitaire, les violences faites aux femmes... Il faut montrer à nos concitoyens à quel point l’Europe peut être utile, en quoi l’Europe peut permettre d’assurer des compétences de manière efficace. Sur beaucoup de sujets, actuellement en débat en France, seule l’Europe permettra d’agir efficacement !

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