07.02.2011

Convention "Notre école est-elle si mauvaise ?" : Discours d'Hervé Morin

Mesdames et Messieurs,

Avant de commencer, j’aimerais d’abord féliciter l’auteur du titre de cette 5ème Convention du Projet : notre école est-elle si mauvaise ?

Je pense en effet qu’il témoigne de l’importance de ce grand sport national qu’est la critique permanente de l’éducation nationale et des enseignants.

Je trouve cette posture véritablement aberrante. Tout d’abord parce que ça ne fait pas avancer les choses. Et parce que quand on interroge les gens sur leur jeunesse, leur éducation, chacun a en tête l’image d’un ou d’une enseignante qui aura marqué sa vie.

Pour autant tout n’est pas tout noir ou tout blanc. Le monde de l’éducation représente une communauté humaine extrêmement importante : près de 900 000 enseignants et près de 12 millions d’élèves. Rendez-vous compte : la moitié des Français sont directement concernés par la question de l’éducation sans même compter les grands-parents et les frères et soeurs. C’est pourquoi il est de notre devoir, nous responsables politiques, de faire en sorte que le système réussisse. Il ne s’agit pas seulement de réussir l’exploit que chacun des 12 millions d’élèves ait un prof face à lui chaque matin. Il s’agit aussi de répondre à un défi qualitatif.

Chaque ministre successif a d’ailleurs tenté, avec plus ou moins de succès, d’imposer une impulsion particulière

Aujourd’hui, et Monsieur HUGONNIER en a parfaitement bien parlé en ouverture de notre convention, la situation est préoccupante. En la matière, je sais qu’il faut prendre les résultats des études internationales avec beaucoup de prudence. On compare des systèmes fortement différents, de pays avec des cultures très éloignées, qui connaissent une grande mixité sociale pour certains et d’autres pas. On compare aussi de grandes démocraties avec des pays qui n’en sont pas. On compare des pays de grande unicité sociale avec des pays de grande diversité.

Prenons l’enquête PISA par exemple : les deux meilleurs systèmes éducatifs recensés sont celui de la Finlande et celui de la Corée. Deux pays diamétralement opposés : l’un de tradition très communautaire dans lequel on fait les choses à son rythme  alors que le second a une culture confucianiste, avec des horaires chargés et des cours particuliers à répétition.

Non mes chers amis, ma préoccupation au sujet de la France ne vient pas de comparaisons avec ces deux pays mais plutôt de l’évolution des résultats de notre système éducatif :

+ 33 % d’élèves en grandes difficultés en 10 ans, l’illettrisme qui frappe 20 % d’une classe d’âge avec même 20 % de plus dont les compétences sont jugées fragiles ; ce qui veut dire que près d’un jeune Français sur deux est en danger.

Autre illustration en abordant la question cette fois par l’équilibre des chances.

En 1990, vous aviez 9 fois plus de chance d’avoir votre bac si vous étiez fils de cadre ou d’enseignant que fils d’ouvrier. Aujourd’hui ce n’est plus 9 fois plus mais 14 fois plus. Et reprenons le classement PISA. Si l’on observe l’évolution des Etats-Unis et de l’Allemagne, leurs situations se sont améliorées depuis la première étude PISA en 2000. La situation de la France s’est, elle, dégradée.

La raison est bien simple, lorsque ces pays ont constaté les limites de leurs propres systèmes –le fameux «Pisa choc » allemand- ils ont impulsé des politiques de grande ampleur, les allemands notamment mais les américains aussi avec le controversé « No child left behind ».

Idem aujourd’hui en période de crise : on revoit toutes les dépenses à la baisse aux USA, au  Royaume-Uni, en Allemagne sauf la recherche et l’éducation. On se souvient aussi de la célèbre phrase de Tony Blair. « J’ai 3 priorités, la première c’est l’éducation, la deuxième, c’est l’éducation et la troisième c’est l’éducation.

Ce qu’on peut constater en regardant les résultats de Pisa et les exemples que j’ai donnés, c’est que la France n’a pas su prendre ce tournant.

Je ne dis pas que rien n’a été fait. Loin de là. Tous les ministres successifs ont essayé de prendre le taureau par les cornes. Mais pour quels résultats significatifs ? 

Les forts sont encore plus forts, les faibles toujours plus faibles, les enfants de cadres ou de profs toujours plus favorisés et les enfants des smicards et des immigrés toujours à la peine. Et avec seulement 8 % de jeunes au niveau d’excellence presque tous issus des milieux favorisés, le brassage social n’existe plus. 

Et tout ça, on le sait, alors que notre dépense publique en matière d’éducation est une des plus fortes. Et même qu’elle augmente. Pour le premier degré, 2 919 euros en 1980 contre 5 694 euros en 2009 ! + 76 % en euros constants ! Pour le second degré, 5 833 euros en 1980 et 9 377 aujourd’hui !

Mesdames et Messieurs,

Je crois que le constat est clair : si les réformes n’ont plus d’impact majeur sur le système et ne permettent pas d’inverser la tendance dans laquelle nous nous enfermons, c’est que le problème est plus global.

Pardonnez-moi cette comparaison mais l’éducation nationale devient comme une vieille voiture dont on changerait progressivement toutes les pièces. Au bout d’un moment, vous aurez beau changer toutes les pièces que vous voudrez, la voiture tombera de plus en plus souvent en panne, et il vous en coûtera de plus en plus cher. Voilà exactement ce qu’il se produit en France. 

Je souhaite donc qu’avant de « changer des pièces », l’on s’interroge plus profondément sur les limites de notre système.

Ce n’est pas, à mon sens, utopique de prétendre faire bouger les choses dans le bon sens. Regardez l’exemple de la réforme de l’université : c’est un modèle de réforme structurelle très lourde que l’on a su mener dans un certain consensus national grâce à un dialogue permanent entre le ministère et les acteurs de la communauté universitaire.

La loi LRU, elle, est une loi fondamentale dont on se souviendra. A titre personnel, j’y vois un grand espoir de réaliser la même initiative en matière d’éducation : ce que nous avons fait et réussi pour l’université, il n’y a pas de raison que nous ne puissions pas le faire pour l’école.

Ce sont deux problématiques très proches : les universités étaient, comme l’école aujourd’hui, un corps en grande difficulté malgré tout le financement que l’on pouvait lui apporter.

Et avec les mêmes stratégies d’évitement qu’aujourd’hui pour l’école.

De même que les étudiants du supérieur préféraient les prépas, les formations courtes ou les universités étrangères aux universités françaises, certains aujourd’hui évitent les bancs de l’école publique pour placer leurs enfants au sein d’institutions privées ou dans le « public » des beaux quartiers.

Ce qui me dérange profondément dans tout cela c’est que ceux qui profitent de ces « voies d’évitement » sont toujours les mêmes : les plus riches ou les mieux informés.

Oui, mesdames et messieurs, l’école aujourd’hui comme l’était l’université hier est un corps malade. Malade pour la même raison: l’absence de responsabilité et d’autonomie. Malade de l’absence de projet, de vision et d’énergie collective.

Les administrations, les rectorats, les chefs d’établissements et les enseignants ont beau y mettre la meilleure volonté du monde, le résultat est le même : en matière d’éducation, l’école républicaine n’y arrive plus et ne remplit pas non plus son autre rôle qu’est la correction des inégalités sociales de départ.

1. Réussir à donner de l’autonomie et des responsabilités à notre école

Pour remettre l’ascenseur scolaire en marche, il faut d’abord réussir à donner à l’école une réelle autonomie et des responsabilités. Il faut passer d’une logique très concentrée, très centralisée à une logique de projet d’établissement. Une autonomie et une logique de projet dans un cadre national bien sûr, une école nationale mais autonome. Une école qui redécouvre les mots de projet, les mots de contrat, les mots d’évaluation et donc les mots de réussite et de république.

Mais avant toute chose, il ne faut pas se voiler la face : une réforme, ça coûte cher. C’est pourquoi je pense qu’il faut immédiatement un moratoire sur la diminution des moyens de l’éducation nationale car aller dans ce sens ne fait qu’envoyer des signaux négatifs sur l’importance que revêt pour nous l’éducation.

Je reviens sur l’autonomie. J’ai conscience que contrairement à ce que l’on veut faire croire la machine éducative n’a pas été inerte : d’énormes efforts de déconcentration ont été accompli et ont permis de transférer des pouvoirs importants aux rectorats et aux académies.

Pour autant, même si le système connaît une lourdeur bien moindre, il n’a en revanche connu aucune transformation décisive.

En vérité, il faut aller encore plus loin et plus fortement dans cette démarche : les établissements doivent devenir bien plus autonomes dans le respect, je le répète, d’un cadre national et de programmes nationaux et il faut à partir d’un socle commun et d’objectifs impératifs donner à chaque établissement de l’autonomie pour adapter sa pédagogie et ses programmes en fonction des enfants.

On ne me fera pas croire qu’on appréhende les apprentissages fondamentaux de la même façon à des enfants du 7ème arrondissement qu’à ceux d’Argenteuil, dont les parents ont  eux-mêmes de grandes difficultés avec la langue française et des enfants d’un village normand dont le niveau socio-culturel est plus faible. 

Sur ce point, on ne doit pas faire les choses à moitié. Les projets d’établissement sont inutiles si on ne donne pas les moyens au chef d’établissement d’en être vraiment le pilote, je pense notamment à la question du recrutement du personnel enseignant.

Sur ce sujet, je suis avec beaucoup d’attention l’évolution de l’expérimentation CLAIR qui permet notamment au chef d’établissements de quartiers sensibles de recruter les enseignants sur profil. Je suis attentif parce que c’est vraiment dans ce sens qu’il faut aller. Je suis attentif parce que, même si la situation s’est améliorée dans les anciennes ZEP grâce, notamment, à une plus grande autonomie, le chemin à parcourir en termes d’équilibre des chances demeure considérable. Il existe des besoins d’individualisation des parcours, des besoins d’accompagnement auxquels nous n’apportons aujourd’hui des réponses encore insuffisantes. Il faut décloisonner les financements et les acteurs et il faut un accompagnement individualisé commençant à l’école, se poursuivant après 16h30 et se terminant avec les parents. Enfin, je suis aussi attentif à l’évaluation du programme CLAIR parce que je sais que l’Education nationale a mené d’excellentes expérimentations par le passé sans pour autant les généraliser par la suite. C’est un peu une de ses spécialités.

Certains me diront qu’il n’y a rien de novateur dans cette idée, que les établissements scolaires doivent déjà établir un projet. C’est bien vrai, mais 1° il n’est pas toujours réellement très original 2° ce même projet d’établissement, à supposer qu’il y ait eu de vrais moyens derrière, ne fait l’objet d’aucune réelle évaluation par la suite. Au total, personne n’y trouve vraiment son compte.

Pour moi, une logique de projet c’est laisser au chef d’établissement la liberté de porter le projet d’établissement qu’il souhaite et qu’il aura partagé avec la communauté enseignante et avec les parents d’élèves, de le contractualiser avec le recteur du point de vue des objectifs et des moyens, de pouvoir y affecter des enseignants fonctionnaires qu’il aura lui-même choisis. Sur ce dernier point, ce n’est ni plus ni moins que ce qui se passe en matière d’emplois  dans les collectivités locales et aujourd’hui dans les facs. Je le répète, cette autonomie se déploiera dans un cadre national.

2. Faire porter l’effort sur le primaire

Mais, Mesdames et Messieurs, on ne peut pas donner plus d’autonomie aux établissements sans leur donner un cadre juridique adapté pour avancer. Sur ce sujet j’aimerais d’ailleurs évoquer la question du primaire.

Tout le monde s’accorde aujourd’hui à dire que concernant l’éducation d’un enfant presque tout se joue au primaire et même au début du primaire, quand on apprend à lire, à écrire et à compter. Or, en France, on connaît une situation anormale où l’école primaire n’a non seulement pas assez de moyens, mais surtout est organisée dans une structure d’un autre âge. Alors bien sûr, les écoles primaires sont trop petites pour se constituer en établissement public.

C’est pourquoi je propose que nous portions l’idée de créer des établissements publics qui réuniraient école primaire et collège.

C’est selon moi une mesure de cohérence, de continuité dans l’enseignement et le moyen de mettre en place une autonomie de pilotage sur un espace suffisamment vaste. C’est à ce prix là que nous pourrons vraiment remettre l’école en marche et rendre utiles et efficaces les réformes.

Regarder la carte scolaire.

 La supprimer pourquoi pas mais en étant sûr que les établissements qui perdent de bons élèves aient vraiment les ressources, les responsabilités pour inverser la tendance et devenir eux aussi de bons établissements. Même chose pour la question de la violence à l’école. Je ne crois pas qu’on résoudra le problème avec des mesures imposées d’en haut. Faut-il des policiers dans un établissement ? N’est-ce- pas aux écoles elles-mêmes de le dire dans le cadre de leur projet ?

Je reviens quelques instants à l’importance de la maternelle et du primaire.

On connaît l’importance des petites classes dans l’apprentissage des fondamentaux.  A 5 ans c’est possible ; à 15 ans, c’est trop tard. Tous les enseignants le disent : en dépit d’efforts colossaux, on n’arrive plus à inverser la tendance et comment voulez-vous apprendre l’anglais à des élèves en 6ème qui ne savent même pas encore lire le français.

Imaginez tous les rattrapages ultérieurs qu’on économiserait et surtout tous les décrochages ultérieurs qui pourraient être évités si nous nous engagions avec plus de force pour le primaire. Cela nous permettrait de traiter un grand nombre de problèmes socioéducatifs bien plus tôt. Je ne veux pas caricaturer et faire dire aux chiffres des choses qu’ils ne disent pas exactement mais c’est quand même curieux de voir que c’est là où la question principale se joue, le primaire, qu’on met le moins d’argent par élève. 5 700 contre 9 400 pour le secondaire et notamment pour le lycée.

Toutes les études sérieuses le montrent,  tout se joue très jeune, et de ce point de vue la question de l’école à 2 ans est très importante. Sur ce sujet, une fois encore, la gauche et la droite s’opposent sans aucun esprit de consensus. Nous, je veux que nous soyons sérieux sur cette question : il ne s’agit pas de généraliser tout de suite ce dispositif, cela nous couterait trop cher, mais ce n’est pas une raison pour écarter une idée qui pourrait répondre à tant d’inégalités sociales dans notre pays. Je propose que nous réfléchissions à la possibilité de scolariser les enfants dès l’âge de 2 ans dans toutes les zones urbaines sensibles et les zones rurales isolées. Est-ce que l’école républicaine c’est de donner les mêmes moyens à Montfermeil, Epaignes ou Neuilly ou est-ce que précisément l’école républicaine ce n’est pas de corriger des inégalités de faire en sorte que les gamins des banlieues ou des campagnes rattrapent ceux de Neuilly ?

Est-ce que la priorité aujourd’hui compte tenu de nos déficits, c’est vraiment de mettre l’anglais partout en maternelle ou n’est-ce pas de donner plus de soutien aux maternelles et aux primaires des quartiers sensibles pour savoir lire, écrire et compter ?

Investir sur le primaire, sur les classes où tout s’apprend et où tout se joue, c’est le seul moyen par lequel on pourra lutter efficacement contre les problèmes de lecture et d’écriture. C’est un enjeu décisif.

3. Perfectionner la formation des enseignants

Mesdames et Messieurs,

J’aimerais maintenant revenir sur la question de la formation des enseignants et ce que l’on a appelé la « masterisation ».

Je le dis sans tabou, j’étais et je reste  favorable à l’intégration des IUFM au sein de l’université mais pas n’importe comment.

Je voudrais aborder deux sujets :

- Les techniques d’apprentissage d’une part,

- La nécessité de renforcer les stages pratiques, c’est-à-dire le terrain, dans la formation des enseignants.

Pendant des années les IUFM ont développé des recherches parallèles en pédagogie en n’utilisant que très peu la recherche scientifique menée en université et qui aurait pu enrichir bien plus le contenu et la manière d’enseigner en France.

Oui il faut que ceux qui pilotent ou qui contrôlent l’école se demandent comment faire bénéficier les élèves des grandes découvertes, en neuro sciences par exemple, plutôt que de bourrer toujours plus les programmes au nom de logiques disciplinaires inefficaces et coûteuses.

Ou bien d’inventer je ne sais quel acronyme aux seuls motifs de transformer une opinion personnelle en pseudo vérité scientifique.

Il nous faut des chercheurs en pédagogie connectés aux plus grands laboratoires qui permettent de faire évoluer la pédagogie en fonction des avancées scientifiques.

On sait par exemple, que les progrès réalisés dans les neurosciences permettent d’améliorer les techniques d’apprentissage. J’en profite pour dire que je suis un vrai partisan du concept d’ « apprendre à apprendre » car je sais que le besoin aujourd’hui est beaucoup plus un besoin de méthode qu’un besoin d’accumulation de savoirs mais je souhaite que ce travail sur les méthodes, sur les compétences, soit le résultat de vrais travaux de recherche par des personnes sérieuses et avec de vraies évaluations et non pas le résultat d’approximations et d’intuitions.

Dans une société où le modèle familial n’a plus rien à avoir avec ce qu’il était il y a 20 ou 30 ans, il faut donner aux élèves les moyens d’être de plus en plus autonomes quand le soutien des parents devient de plus en plus difficile.

Pendant des années, les IUFM ont ignoré la réalité du terrain et préféré, le talent scientifique en moins, se constituer en annexe du CNRS. L’acculturation universitaire est selon moi essentielle, mais il n’en demeure pas moins que qui dit formation des maîtres dit aussi apprentissage de terrain.

On a aussi voulu faire cette réforme largement pour des raisons budgétaires, tout le monde le sait, avec une vision à très court terme. Et bien je vous le dis, face à un problème d’une telle gravité, il faut cesser  de vouloir faire de fausses économies lorsqu’il s’agit de dépenses d’avenir. Oui à la formation en universités, mais non au minimum syndical en matière de stages pratiques. Il nous faut des enseignants ayant eu une formation en pédagogie et un apprentissage sur le terrain.

Je sais que le Président de la République et que le gouvernement ont entendu ces critiques : il faut à tout prix corriger le tir le plus rapidement possible.

4. Améliorer les conditions de travail des enseignants

Mesdames et messieurs,

Lorsque j’évoquais tout à l’heure le sujet de l’autonomie des établissements, je le faisais en conscience : je sais qu’il y a dans notre pays des résistances face à ce choix et notamment de la part des enseignants.

Ces résistances sont normales mais il ne faut pas céder à la peur de l’inconnu. On n’entendait les mêmes lors des lois de décentralisation des collectivités locales. Qui voudrait revenir en arrière ? On entendait les mêmes lors de la LRU, qui voudrait revenir en arrière ?

Et encore, je ne parle pas de décentralisation, je parle simplement de la mise en place d’une organisation nouvelle fondée sur le contrat entre l’établissement et le recteur et entre le recteur et l’Etat.

Le changement est nécessaire car aujourd’hui les enseignants ne sont pas heureux. Critiqués et souvent isolés dans l’exercice de leur vie professionnelle, les enseignants n’exercent pas un métier facile. Cette solitude que l’on retrouve chez beaucoup de professions libérales (notaires ou médecins par exemple) n’est pour eux pas compensé par un salaire.

Ce dont les enseignants souffrent le plus, ce n’est d’ailleurs pas du manque d’argent, peu de jeunes engagés dans cette voie souhaitent devenir enseignant pour devenir riche. Non, ce dont ils souffrent réellement c’est du manque de reconnaissance.

Je voudrais à ce sujet formuler deux remarques. Tout d’abord, grâce à l’autonomie des établissements, nous réussirons à inscrire le travail de l’enseignant dans le collectif en créant un lien social fort dans la communauté enseignante et entre les enseignants et les parents.

Qui peut croire que les métiers de l’enseignement attirent encore les étudiants quand on voit les très faibles inscriptions aux concours d’enseignant.  En étant directement recrutés par le chef d’établissement et la communauté éducative, ils trouveront plus de sens dans leur travail. Cela apportera une réponse à la vraie solitude des enseignants ainsi qu’à leur frustration.

D’autre part j’aimerais évoquer avec une autre faiblesse du système français par rapports aux autres systèmes éducatifs : il s’agit de la faiblesse du temps passé par l’enseignant dans son établissement. Dans la plupart des pays étrangers, les professeurs restent sur leur lieu de travail pour préparer leur cours mais aussi pour assurer un rôle de conseil auprès des élèves en difficultés ou en recherche de réponses.

J’y vois deux sous-sujets. Le premier est celui des moyens donnés aux enseignants.  Les salles des profs mis à leur disposition sont bien trop bondées pour qu’ils puissent correctement rempli cette mission. C’est pourquoi je propose que les professeurs puissent disposer d’un bureau.

Doit-il être individuel, partagé avec 1 ou 2 collègues, ou sur réservation peu importe mais ce que je sais c’est que si l’on veut faire vivre un établissement il faut plus d’adultes tout au long de la journée. On ne peut pas demander aux profs de rester plus longtemps dans l’établissement et ne pas leur donner les conditions nécessaires à l’exercice de leur fonction.

Par ailleurs, cette augmentation du temps de présence des enseignants ne doit pas venir d’en haut mais justement du cadre d’autonomie que nous aurons mis en place au préalable. Je regrette qu’au moment du débat sur la réforme des retraites, on ne se soit pas beaucoup posé la question des enseignants. Bien sûr ce n’est pas la pénibilité de l’ouvrier des ateliers de la SNCF ou celle des ouvriers du bâtiment. Mais pensez-vous qu’un professeur peut enseigner de la même manière jusqu’à 67 ans ?

Là aussi, je pense qu’un cadre administratif rénové pour les établissements permettra aux établissements de produire de nouveaux postes de direction ou d’encadrement qui permettront aux enseignants d’évoluer et de sortir du carcan dans lequel ils sont aujourd’hui enfermés toute leur vie durant.

Mesdames et Messieurs,

En conclusion et vous l’aurez compris au fil de mes réflexions, je veux que l’on cesse d’appliquer des rustines à notre système éducatif actuel. Le temps m’a manqué pour aborder d’autres sujets mais je pense que tant qu’on ne mettra pas en place un véritable cadre d’autonomie pour nos établissements scolaires, les effets des différentes solutions proposées sur des thèmes comme l’orientation, la professionnalisation des parcours ou encore la question de la sécurité à l’école seront forcément atténués. Il faut avant tout donner les moyens à nos établissements d’accomplir leurs missions et de leur faire confiance.

Je me suis toujours méfier de ceux qui comme dans Le Guépard, veulent que tout change pour que, au final, rien ne change. C’est pourquoi sur la question de l’éducation, je souhaite que l’on reste équilibré dans la réflexion et que nous nous inspirions du modèle de la réforme universitaire.

Lors de la dernière convention,  j’avais émis l’idée de nommer un garde des sceaux pour une durée de 5 ans avec approbation du parlement. Concernant l’éducation je pense que l’on pourrait également défendre le principe qu’une action réformatrice de qualité nécessite qu’un ministre de l’éducation ne soit pas interchangeable et puisse mener son action dans la continuité.

Le moment est venu par cette réforme de faire confiance à notre école pour prendre son destin en main. Cela peut paraître douloureux mais ce souffle de liberté et d’optimisme est tellement nécessaire.

Je suis persuadé que sur des questions d’une telle gravité, un consensus politique est possible. Il est même indispensable car une nation où 40 % d’une classe est au bord du précipice éducatif est une nation qui est en grand danger et qui marche vers le gouffre les yeux grands ouverts.

Ce constat, il nous engage tous.

Mais  c’est à nous, centristes, de porter ces propositions et cette vision à la fois juste et courageuse notamment lors de la prochaine élection présidentielle.

Je vous remercie

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